Avril

Le nom d’avril provient du latin «aperire» qui signifie ouvrir. Ce mois qui ouvre les
portes du printemps est aussi dénommé «le mois fleuri».

2 avril. Fête de Jivko, Jivka (de jiv (en bulgare – vivant)

3 avril – La Saint-Lazare

Le samedi d’avant le Dimanche des Rameaux, est dédié à saint Lazare. Les vieilles personnes vous diront que Lazare est le maître des bois et des broussailles, qui aide les hommes à les transformer en terres cultivables. Cela explique pourquoi il est représenté armé d’une hache. Le jour de la Saint-Lazare est associé à la coutume dite des lazarnitsi, une des plus joyeuses fêtes printanières dédiées aux jeunes
filles. En Thrace, la fête est célébrée le dimanche, alors que le samedi est appelé «Saint-Lazare tsigane», car ce jour-là les enfants tsiganes font du porte-à-porte pour quémander de petits cadeaux. Le prénom de Lazare provient de l’hébreu: Eleazar qui signifie dieu (vous) aide.

 

 

 

 

4 avril Rameaux de saule
(fête des fleurs)

C’est le jour des jeunes filles, nommées
lazarki.
Selon la légende, ce jour-là à Tchatalovo,
village de la plaine de la Thrace, était organisée
une grande fête. Une jeune paysanne
prénommée Rouja, du village voisin de
Kourtalan, était partie y assister, accompagnée
de ses parents. En cours de route, elle
ressentit une grande soif et dit à son père
qu’elle ferait un détour pour aller boire de
l’eau au puits du dragon. «N’y va pas. Attends
d’arriver au village, car l’endroit est mal
famé!», lui dit son papa, mais la fille n’écouta
pas ses conseils et s’écarta de la route. Tandis
qu’elle s’approchait de la source et s’apprêtait
à étancher sa soif, survint le dragon qui lui demanda sa main, promettant de lui assurer
une vie riche et facile. Rouja prit peur, bondit vers le chemin, rattrapa sa mère et son père,
mais ne leur dit rien de l’offre du dragon. Lorsqu’ils arrivèrent à la fête, Rouja rejoignit les jeunes lazarki qui chantaient et ansaient,
mais sa pensée était ailleurs. Elle avait bien envie d’être riche et de vivre dans un palais. Dès que les participants à la fête se furent dispersés, elle courut vers le puits, se jeta dans les bras du dragon et alla vivre dans son palais souterrain.
Des années passèrent ainsi. Un jour, elle éprouva de la peine pour la vie terrestre et ses proches et demanda au dragon de la laisser
remonter en surface. Celui-ci accepta et la déposa le même jour à la même source. Mais avant de rejoindre la fête, elle voulut se débarrasser de la queue de dragonne qui avait poussé sur son dos. Elle se retourna et la mordit, tachant de l’arracher, mais en vain. Sa
bouche se remplit de sang. Son cœur éclata d’épouvante à l’idée que ses compagnes pourraient la voir ainsi affublée d’une queue. C’est ainsi que la retrouvèrent ses camarades. Elle fut enterrée près du puits et tous les ans au même endroit se réunissaient ses amies et dansaient tout autour. La ronde dansée ce jour-là n’est pas bouclée, mais ouverte et imite une queue de dragonne, en l’honneur de Rouja. Cette danse est appelée buenets (la vive) et les filles sont nommées des lazarki.
La Saint-Lazare occupe une place importante dans le système rituel du village patriarcal bulgare. Elle reprend certains éléments d’anciennes fêtes païennes thraces et bulgares qui reflètent la volonté d’interférer positivement sur l’avenir à la fin de l’hiver et au début du printemps. Les lazarki sont des jeunes filles ayant
atteint la maturité sexuelle. Leur participation à la fête est imposée par la société patriarcale, car avant d’obtenir le droit de se marier, elles doivent avoir pris part à la fête. Cette participation est l’étape ultime de leur socialisation et de leur entrée à part entière dans la communauté
des adultes. L’introduction des lazarki représente un ensemble de rites, de
costumes, de chants et de danses spécialement destinés à la fête.
Les lazarki dansent la ronde non bouclée, conduite par l’une d’entre elles nommée «marraine», choisie pour être la jeune fille la plus en vue du village, respectée par les jeunes et par les vieux. Son rôle est important. Pendant que ses compagnes dansent et chantent dans la cour, elle quitte leurs rangs,
s’approche de la maîtresse de maison, pose une serviette sur son épaule et attend des cadeaux: des œufs, du fromage, de la farine, des noix, des fruits secs et de menues pièces de monnaie. La marraine doit savoir d’avance
quelle chanson convient à chaque maison. Les chansons des lazarki sont très variées et vantent soit le maître, soit la maîtresse, soit les enfants, soit le jeune homme ou la jeune
fille de la maison, mais toujours autour du thème principal de l’éloge à l’amour, au mariage, à la famille et à la fécondité espérée. A la fin de leur tournée les participantes à la fête se rassemblent au bord de la rivière et chacune pose sa couronne de fleurs dans l’eau sur une batte en bois. Selon l’ordre dans lequel les couronnes sont emportées par le courant, elles tentent de deviner laquelle d’entre elles se mariera la première. La Saint-Lazare est la fête de ceux qui portent des prénoms de fleurs ou de plantes:
Kalina, Violeta, Camelia, Margarita, Liliana.

5 avril. Lundi Saint

La semaine avant Pâques, appelée semaine Sainte ou semaine de la Passion, est une période de recueillement et de restrictions. Il n’est pas permis de danser et de jouer d’instruments de musique ; on ne peut chanter que des cantiques. Selon la croyance populaire, les infractions à la règle entraînent l’apparition de furoncles sur les parties délicates. Ce jour-là commence le grand nettoyage printanier.

6 avril Mardi Saint

Ce jour-là, les filles et les jeunes mariées vont chercher de l’eau «silencieuse». C’est de l’eau fraîche provenant de trois sources différentes qui doit être puisée et ramenée à la maison dans le plus grand silence. L’eau cultuelle ainsi recueillie est censée posséder des vertus curatives. Une fois la tâche accomplie, les porteuses d’eau se lavent la tête en ajoutant dans la cuvette un peu d’eau «silencieuse ».

7 avril Mercredi Saint

Ce jour-là, les femmes s’interdisent les travaux féminins: couture, filage, tissage. Les enfants cueillent du géranium et en font des bouquets, destinés à la coloration des œufs le lendemain.

8 avril Jeudi Saint

Dans un manuscrit du Xème siècle, conservé au monastère Saint-Anastase près de
Salonique, il est écrit que la coutume slave d’offrir des oeufs colorés existe depuis
l’époque des apôtres et a pour origine Sainte Marie-Madeleine. Selon la légende, elle s’était rendue à Rome auprès de l’empereur Tiberius et lui avait offert un œuf rouge en
disant: «Le Christ est ressuscité !», en signe de sa profonde foi. Depuis lors, les chrétiens
imitent son exemple. Une autre légende fait référence au festin organisé par un groupe de
juifs pour célébrer la mort du Christ. La table était garnie d’un poulet rôti et d’œufs durs.
Lors du repas, l’un des convives prédit que le Christ ressusciterait trois jours plus tard. Le maître de maison répliqua: «Il ressuscitera quand le poulet rôti recouvrera la vie et les œufs changeront de couleur!» Il n’avait pas fini sa phrase que les œufs se teignirent en rouge et le poulet se mit à sautiller sur la
table. En Bulgarie, la coutume de coloration des œufs a été empruntée par les Slaves pendant
la seconde moitié du Vème et au début du VIème siècle. En Bulgarie occidentale, les œufs colorés sont appelés «perachki». Certains chercheurs pensent qu’il s’agit d’un dérivé du nom de Perun, dieu des foudres dans la mythologie slave. Le jeudi était considéré comme le jour de Perun, d’où la coutume
de colorer les œufs le jeudi saint. La tâche de coloration des œufs de Pâques est confiée à la maîtresse de maison, qui commence toujours par teindre en rouge les deux premiers, les plus frais, retirés le matin même
du poulailler. Ils sont censés posséder des vertus curatives et sont gardés toute l’année. Le premier est placé à coté de l’icône, puis enterré dans le sillon lors des labours du printemps suivant. Avec le second œuf rouge, la maîtresse de maison caresse le visage des enfants, en gage de bonne santé, avant de le
ranger pour s’en servir en tant que remède pour les hommes et les animaux. Dans le passé, la coloration des œufs de Pâques n’était répandue que dans les villages ou dans les monastères où cette pratique se
traduisait par la réalisation de véritables oeuvres d’art. C’était une obligation à laquelle les
femmes devaient se plier le jeudi saint ou, éventuellement, le samedi, mais alors il fallait
le faire en cachette pour soustraire les œufs aux yeux malveillants. Dans le passé, la couleur la plus répandue était le rouge, obtenue à l’aide de pigments végétaux. Dans la région du Rhodope on se servait aussi d’une couleur à base de cochenille ou d’origan cueilli le jour de la Saint- Jean-Baptiste. Dans la même région était utilisée une plume spéciale pour décorer les œufs à l’aide de la cire ou de la colle forte, avant leur immersion dans la couleur. Confectionnée à l’aide d’une pièce d’argent repliée et aiguisée à l’extrémité, elle était fixée au bout
d’un rameau de sureau ou de roseau. Les ornements ainsi obtenus sur les œufs de Pâques comportent des motifs végétaux anthropomorphes ou zoomorphes stylisés – papillons, poissons, oiseaux, serpents et
araignées, encadrés par des svastikas solaires ou des figures géométriques, sans oublier les codes graphiques du message traditionnel «Le Christ est ressuscité».

9 avril Vendredi Saint

On l’appelle également le vendredi de la crucifixion. Le jour de cette grande fête, on ne doit pas travailler, sous peine de voir la récolte détruite par la grêle. Dans certaines régions, ce jour-là, les jeunes filles rajoutent à l’aide de charbons ou de plumes des motifs ornementaux sur les œufs coloriés la veille.
La légende dit que le Christ, portant sa lourde croix sur le chemin du Golgotha, avait demandé un peu d’eau à une lavandière. Celle-ci lui avait servi de l’eau sale de sa lessive qu’il avait bue, sans rien dire. Plus
loin, les habitants d’une maison lui avaient tendu un bout de pain tout juste sorti du four. Arrivé au sommet de la colline, le Christ avait prononcé tout bas: «Maudite soit la femme qui fait la lessive ce jour-là et bénie soit celle qui prépare le pain!» C’est pourquoi, le Vendredi Saint les femmes ne font pas la lessive, mais font cuire les pains et les brioches de Pâques. Elles ont auparavant renouvelé la levure, car les brioches de Pâques sont préparées avec de la levure fraîche. Dans le passé, une maison restée sans levure était
menacée d’infécondité pendant l’année. Pour renouveler la levure, il faut préparer la pâte et la laisser fermenter d’elle-même au chaud. Le ferment est ensuite employé pour préparer les pains rituels de Pâques et conservé. Les pains rituels de Pâques sont de forme différente: ronds et troués au milieu, ovales ou
en forme de natte tressée, mais dans tous les cas sertis d’œufs rouges. Ils sont préparés par de jeunes femmes mariées à l’aide de farine de froment tamisée à trois reprises. Au cours de la fermentation, on y ajoute un brin d’ortie, de géranium ou de basilic fraîchement cueilli.

10 avril Samedi Saint

On l’appelle encore samedi de la commémoration, car ce jour-là les femmes se rendent généralement au cimetière. Elles encensent les tombes et y font des libations au vin, allument des cierges, distribuent des œufs colorés, du blé bouilli et du pain à la mémoire des défunts. Dans certains villages, le Samedi
Saint est le jour où il convient de rembobiner la laine des dévidoirs et des métiers à tisser pour invoquer la pluie et la bonne récolte.

11–13 avril Pâques

Oh, Pâques, oh, Soleil la vie est un oiseau rouge et bariolé,
par toi couvé! Chanson populaire Pâques, connue également sous le nom de «Velikden» (le grand jour), provient de l’hébreu pesah et signifie «passage». Les origines de cette fête remontent à l’antiquité. Les tribus nomades sémites et thraces la célébraient pour exprimer leur joie de la venue du printemps et du renouveau de la nature. Les chrétiens célèbrent ce jour-là la résurrection du Christ qui, à l’origine, coïncidait avec le jour de la Pâque juive. En 325, le concile ne Nicée décida que Pâques serait célébrée le premier dimanche après la pleine lune du printemps. Cela explique pourquoi cette fête est mobile et peut se situer, selon l’année, entre le 4 avril et le 8 mai. Une vieille légende dit qu’à l’époque où
Dieu vivait sur terre parmi les hommes et les soignait, il y avait un royaume hanté par un sorcier qui avait enfermé l’eau et le soleil dans une grotte profonde. Les hommes travaillaient du matin au soir, mais la terre ne donnait rien sans eau et sans lumière. L’herbe s’était desséchée, les animaux étaient morts, les oiseaux avaient disparu. Les hommes vivaient dans de petites masures et se nourrissaient de racines. Ils avaient oublié leurs traditions et vivaient dans un climat de méfiance et de haine. Dans l’une de ses maisonnettes vivait un homme seul, avec ses deux enfants, un garçon et une fille. Le sorcier avait enlevé son épouse
et l’avait forcée à lui servir de domestique dans son palais. L’hiver avait été rude et la terre était bloquée par le gel. Le printemps venu, le père s’était rendu dans la forêt pour y trouver quelques racines tendres. Il avait fabriqué un œuf en bois, l’avait teint de terre les oiseaux se remirent à chanter et les animaux regagnèrent leurs étables. La terre ressuscita pour une vie nouvelle. Depuis lors, cette journée est dédiée au père Velikden. Les hommes colorent les œufs en rouge et célèbrent le renouveau de la nature. L’œuf coloré est le principal symbole de Pâques. Cette pratique est aussi
vieille que la fête. Dans la croyance populaire, l’œuf représente l’origine de la vie, du renouveau dans la nature, de la renaissance. Selon les anciens mythes, le monde entier provient d’un œuf. Les premières références à l’œuf primitif se retrouvent dans les papyrus
égyptiens du Nouvel Empire (XIV–XI s. av.
J.-C.), selon lesquels le dieu Thot était sorti de
l’œuf universel à Hermopolis, près du Caire.
Le Livre des morts, chapitre 85, raconte que les huit dieux (l’Ogdoade) d’Hermopolis avaient émergé de l’océan primitif Noun et conçu l’œuf originel dont le soleil était éclos sous l’apparence d’un oiseau. Les «Textes des sarcophages» parlent de l’œuf dans lequel se trouvaient ensemble Osiris et son frère Seth,
le premier porteur du bien, l’autre incarnant le mal, issus de la même source. Au Moyen Age, l’œuf symbolisait les quatre éléments: la coquille – la terre, la membrane – l’air, le blanc – l’eau, le jaune – le feu. Dans la mythologie et la vie quotidienne, la vie et la mort sont toujours en rapport étroit, c’est pourquoi l’œuf est devenu également le symbole de la mort. Au musée des arts populaires de Bâle (Suisse) est conservé le costume de la Mort, décoré d’une guirlande de coquilles rouge et l’avait ramené à ses enfants pour qu’ils jouent avec. A son retour, les petits s’étaient endormis et il déposa l’œuf sur l’oreiller,
afin qu’ils le retrouvent à leur réveil. L’homme s’endormit et fut visité dans ses rêves par un vieillard qui l’avertit que le sorcier viendrait le lendemain dans sa maison pour enlever ses enfants, mais qu’il n’avait
rien à craindre, car l’œuf rouge les protégerait. Ce vieillard à la longue barbe blanche était en fait le père Velikden. Le lendemain, le sorcier, juché sur son char que tirait un dragon tricéphale se présenta
devant la maisonnette. Le père épouvanté serra ses enfants dans ses bras pour les protéger. Se souvenant des conseils du vieil homme de ses rêves, il brandit haut et fort l’œuf de bois qui se mit à briller comme le
soleil. Aveuglé et privé de sa force maléfique, le sorcier fut réduit en fumée. Les hommes brisèrent les cadenas et libérèrent l’eau et le soleil. Les ruisseaux se mirent à dévaler les pentes de la montagne. Les arbres retrouvèrent leurs feuilles; les fleurs s’épanouirent ; d’œufs. L’un des musées de Milan présente
une Madone à l’enfant Jésus de Piero della Francesca au-dessus de laquelle est suspendu un œuf, symbole de la vie, de la mort et de l’espoir sans cesse retrouvé. Cette symbolique explique pourquoi, les défilés de koukeri en Bulgarie sont précédés d’un vieillard portant un œuf. Les koukeri, comme on sait,
«meurent» symboliquement pour renaître avec le renouveau de la nature et la perspective de prospérité.
Le pain est le second symbole de Pâques. Il n’est jamais coupé au couteau, mais rompu par la personne la plus âgée de la maison, en autant de morceaux que de membres de la famille, plus un pour Dieu le Père.
Après le repas de Pâques vient le tour des chants, des danses et des balançoires. Les jeunes filles non mariées doivent se balancer pour échapper à la convoitise du dragon, s’assurer une bonne santé et susciter l’amour des jeunes gens.

11 avril. Fête de Véliko, Velika (prénom protecteur et prémonitoire signifiant grand)

18 avril LE DIMANCHE DE THOMAS

Le premier dimanche après Pâques est
nommé dimanche de Thomas, d’après le nom
d’un des douze apôtres de Jésus. Selon
l’Evangile, Thomas, appelé encore l’incrédule,
n’avait pas cru à la résurrection du Christ,
c’est pourquoi le Sauveur lui est apparu
quelques jours plus tard et a autorisé l’apôtre
à poser son doigt dans ses plaies.
La semaine qui précède le dimanche de
Thomas comporte plusieurs fêtes consacrées
aux jeunes filles, parmi lesquelles la plus connue
est le mercredi dit radieux. Dans de nombreuses
régions, ce jour-là les jeunes filles
confectionnent une poupée en se servant des
pantoufles d’une jeune mariée (jaunes pardessous, rouges par-dessus). La poupée est vêtue d’une chemise d’homme et représente une réplique de la grande divinité primitive androgyne dont, selon la mythologie populaire, proviennent les êtres humains.

 

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